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Cargotram Dresde 1

Cargotram Dresde

 

L’Atelier Parisien d’Urbanisme (APUR) vient de publier un état d’avancement des études visant à réaliser à Paris un projet de tramway marchandises. Cette étude n’est pas la première sur ce sujet mais de très loin la plus concrète et le résultat de recherches très avancées.

Il faut saluer le côté opérationnel et réaliste de cette étude, malgré les difficultés qui y sont relevées.

Utiliser le tramway pour remplacer des camions qui entrent dans la capitale est un enjeu tout à fait intéressant et vertueux. En effet, un tramway a une capacité plus réduite qu’un train et permet donc d’acheminer en ville des flux en nombre plus importants.

Même si l’organisation du réseau parisien (ou des lignes), ne permet pas, contrairement à d’autres villes, de rentrer au cœur même de la capitale, comme la Seine ou certaines réseaux ferroviaires, il s’en approche grâce au T3 et T3B.

Le schéma choisi est une distribution en grappe, qui nécessite donc deux ruptures de charges. Les palettes préparées par magasin seraient acheminées par camion vers un point d’entrée sur le réseau de tramway, puis transportées en tramway, puis à nouveau déchargées dans d’autres véhicules, qu’on peut supposer électriques ou au GNV, vers les magasins.

Le surcoût est estimé à 3 ou 4% du prix des produits, écart qui, s’il est confirmé, peut peut-être être accepté par certains enseignes ou certains consommateurs. Ceci reste une incertitude connaissant la tension sur les prix de produits de grande consommation.

Sans vouloir remettre en cause cette étude très précise et réaliste, qui va jusqu’à chiffrer les investissements et définir les sites d’entrée possibles,  ne pourrions-nous pas imaginer des solutions innovantes autour de deux aspects :

1)      Pourquoi transférer des palettes alors que nous pourrions peut-être imaginer de concevoir et de transférer des conteneurs ? C’est par exemple ce qu’a imaginé et mis en œuvre Norbert Dentressangle avec Franprix sur la Seine. Le conteneur a fait ses preuves dans le maritime depuis … 1956. Il est évidemment beaucoup moins onéreux, plus rapide et plus sécurisant de transférer des conteneurs. C’est également l’idée sur laquelle travaille le Cluster Logistique Urbaine Durable des Hauts-de-Seine.

2)      Ne pourrions-nous pas imaginer des rames qui puissent la journée transporter des voyageurs et la nuit des marchandises ? Cette idée a déjà été mise en pratique dans le fret aérien postal. Ainsi, Europe Airpost transforme en 20 minutes (et 3 personnes seulement) un Boeing 737-300 d’un avion de fret en avion de passager et inversement. Les constructeurs de rames de tramway doivent peut-être réinventer le matériel afin de l’adapter aux besoins des villes et notamment de la logistique urbaine !

Au-delà des expérimentations et démonstrateurs, dont l’utilité ne peut être que saluée, la logistique urbaine ne pourra être mise en œuvre à grande échelle que sur des raisonnements industriels.

photo QueneauPassionné de l’histoire de Paris, Raymond Queneau, de 1936 à 1938, publiait quotidiennement 3 questions sur l’histoire de Paris dans l’Intransigeant, journal de l’époque.

Parmi ces nombreuses questions, j’en ai trouvé un certain nombre qui intéresseront les spécialistes de la logistique urbaine et de Paris…

1) Que prétendent représenter les deux fontaines de la Place de la Concorde ?

Ces deux fontaines représentent la navigation fluviale et maritime.

Une prédestination pour la Place de la Concorde, haut lieu de la logistique urbaine grâce à Chronopost.

2) A quelle époque fut créé le canal Saint-Martin ?

Il fut ouvert à la batellerie en 1825.

Bientôt 190 ans !

3) Quelle est la voie de Paris la plus étroite ?

Le passage de la Duée (20ème), large de 0,90 m.

Pas simple à distribuer, même en cargocycle !

4) D’où vient le nom de Grenelle ?

Grenelle, c’est-à-dire « petite garenne », était une exploitation agricole. Les terrains furent lotis en 1823. Grenelle fut annexée à Paris en 1859.

Et 150 ans après un espace logistique urbain !

5) Il y a à Paris deux passages des Epinettes. Où se trouvent-ils ?

L’un dans le 14ème, 76 boulevard du Montparnasse et l’autre dans le 17ème, 25 rue des Epinettes.

Un piège pour le transporteur le plus avisé !

6) A quelle époque a-t-on systématiquement mis leur nom au coin des rues ?

en 1728.

On s’y retrouve enfin pour livrer à Paris !

7) A quelle époque eurent lieu les premières distributions d’eau à domicile à Paris ?

C’est le 14 juillet 1782 que fut inaugurée la première distribution d’eau à domicile à Paris. L’eau était prise dans la Seine.

Déjà la livraison à domicile !

8) Quelle est la rue qui change de nom du côté des numéros pairs tandis qu’elle poursuit son cours du côté impair pendant plus de 38 numéros ?

La rue de Rivoli.

Heureusement qu’on a inventé le GPS !

9) Quand fut inauguré à Paris le premier tramway à vapeur ?

C’est en 1889 que fut inaugurée la première ligne de la place de l’Etoile à Saint-Germain.

5 ans après seulement, Paris avait son premier tramfret avec l’Arpajonnais !

10) A quelle époque furent supprimés les péages sur les ponts de Paris ?

en 1847.

Une idée pour remplacer l’écotaxe ?

11) De quand datent les premiers tramways à Paris ?

La première ligne à traction animale date de 1854. Elle allait du Pont de Sèvres à la Concorde.

Une bonne idée pour une ligne de tramfret ?

12) A quelle époque disparurent à Paris les porteurs d’eau ?

Les derniers porteurs d’eau « à tonneau » disparurent en 1872.

La logistique à pied n’a pas disparu pour autant !

13) Quel est le grand magasin qui a été construit par Eiffel ?

Le Bon Marché.

Un excellent cas de logistique urbaine !

14) Combien y avait-il d’automobiles à Paris en 1903 ?

18 000 automobiles sur un total de 90 000 véhicules.

Nous en avons actuellement 716 000 sur un total de 847 000.

Lisez et relisez ce superbe petit livre qui regorge de devinettes toutes aussi amusantes et intrigantes les unes que les autres. Mieux qu’un Trivial Pursuit !

Même si la logistique urbaine est une science nouvelle, elle doit prendre en compte l’histoire des villes, leurs caractéristiques et leur contraintes.

Alors, comme Raymond Queneau, apprenons à connaître nos villes pour mieux les organiser !

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Nous pourrions autour d’une fable imaginer le rôle de chacun dans la logistique urbaine : l’architecte, le logisticien, le consommateur, le commerçant, l’autorité publique, le citoyen…

Qui cherche à prendre le dessus sur l’autre ? Quels sont les intérêts de chacun ? Sont-ils contradictoires ? Y-a-t-il un dénominateur commun ? Quelle est la morale ?

L’histoire se déroule en 1853. Haussmann, fraîchement nommé préfet de la Seine, obéit aux ordres de Napoléon III, fin urbaniste et passionné par Paris.

L’urgence est l’approvisionnement de Paris. On ne peut pas (aujourd’hui encore) dissocier logistique urbaine et approvisionnement d’une ville. La première fonction de la logistique pour une agglomération est en effet de permettre à ses habitants d’accéder aisément aux biens de consommation nécessaires à leur vie quotidienne.

L’organisation de l’approvisionnement d’une ville nécessite une logistique de proximité, permettant le négoce et le cross-docking  des produits de consommation courants, notamment alimentaires. C’est le rôle du marché de gros ou des halles.

Même si l’idée des Halles Centrales ne date pas de Napoléon III, il en porte sans aucun doute la paternité.

Haussmann exécute et parvient à confier le projet à son ami Victor Baltard, plutôt qu’à l’architecte pressenti, Viollet-Le-Duc. Le cahier des charges est le plus simple que l’on puisse imaginer :

« Ce sont de vastes parapluies qu’il me faut, rien de plus ! » indiquait Napoléon III au baron Haussmann.

Cette phrase, rapportée par Haussmann dans ses mémoires, ne devrait-elle pas être mise en perspective avec les cahiers des charges architecturaux souvent complexes et qui aboutissent à des solutions économiquement difficiles, que nous connaissons actuellement ?

La logistique urbaine, même si les solutions sont parfois délicates à mettre en œuvre, nécessitent des moyens simples. En effet, contrairement à des organisations logistiques nécessitant des mécanisations lourdes, la logistique urbaine a besoin d’outils flexibles, simples et économiquement acceptables pour le consommateur final qui en supportera le coût.

Trier des colis pour les acheminer d’un mode de transport vers un autre, optimiser des moyens, décharger des conteneurs pour adapter le moyen de transport à la ville ne doit pas nécessiter des solutions complexes. Voilà pourquoi la mission de l’architecte est passionnante : réinventer le parapluie.

Le parapluie protège, est mobile, flexible, adapté aux situations et simple.

C’est bien le rôle de l’immobilier dans la logistique urbaine.

Sur un seul niveau, en sous-sol ou de plain-pied, sur deux ou de multiples étages, le principe est le même : parvenir à des solutions économiquement acceptables permettant à la logistique urbaine de se développer à grande échelle.

Le rôle de l’architecte est alors primordial : rendre cet outil de travail adapté et intégré à la ville, tout en maîtrisant les coûts afin de lui conserver sa fonction principale.