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Notre emblème de Paris, et de la France, a failli disparaître à jamais, en seulement quelques heures. Nous étions tellement habitués à la voir, sans même parfois la regarder, que la disparition de la flèche nous éprouve et nous montre la fragilité de notre patrimoine.

Fort heureusement, et grâce à l’exceptionnelle professionnalisme des Pompiers de Paris, l’édifice est toujours là, encore debout, mais très endommagé. Ses trésors sont pour nombre d’entre eux à l’abri.

 

Un chantier de reconstruction considérable s’annonce, au cœur de Paris. Les meilleures entreprises, architectes et ouvriers travailleront pendant des années pour nous rendre cet édifice aussi beau que nous l’avons connu.

Ce n’est pas un hasard qu’un chantier aussi inédit et complexe,  soit confié à un militaire, le Général Georgelin. En effet, il s’agit là d’un défi qui nécessite une organisation sans faille et une stratégie. Les choix seront tous examinés, critiqués, mais devront être fait tous les jours, pour atteindre l’objectif de rendre à Paris cet édifice pour la date fatidique de 2024.

Si le financement de ce projet semble acquis, en seulement quelques jours, grâce notamment à des grands donateurs qu’il faut remercier, le chantier doit aussi être exemplaire.

Pour cela, il doit dès son démarrage intégrer des composantes environnementales et les initiatives possibles ne manquent pas.

Situé sur la Seine, il serait dommage de ne pas utiliser prioritairement cet axe de transport, pour l’acheminement et l’évacuation des matériaux ou des parties démontées pour restauration sur un site extérieur.

La multiplicité des corps d’état et des matériaux qui seront utilisés peuvent nécessiter de créer un site de délestage extérieur, qui pourrait avoir une fonction de centre de consolidation de chantier.

Ainsi, ce site sécurisé permettrait de stocker les pièces et matériaux en provenance des fournisseurs, et de les relivrer sur le site de façon cadencée, en fonction de rendez-vous précis, et consolidée, c’est-à-dire avec des véhicules bien rmplis, qui pourraient éventuellement être acheminés sur la Seine.  Ces véhicules pourraient bien entendu être « propres », c’est-à-dire électriques ou au GNV.

Ce site extérieur permettrait de gérer au mieux d’exiguïté du site, de réduire les risques d’accidents en effectuant du prémontage d’éléments, de réduire les déchets sur place et d’en améliorer ainsi le traitement et la valorisation.

Il s’agit là d’une proposition de base arrière d’un chantier comme les militaires le connaissent si bien sur leurs théâtres d’opération. On ne met pas le stock d’armes au milieu du champ de bataille !

Le combat contre le temps auquel le Général Georgelin sera confronté ne doit pas nous faire oublier la nécessité de faire de ce chantier un exemple sur le plan environnemental.

Montrer le savoir-faire de la France pour faire revivre ce monument passe aussi par la logistique et l’environnement. Le chantier de Notre-Dame doit être un chantier organisé dans un schéma d’excellence environnementale et de logistique urbaine !

La SITL 2018 a été marquée par un programme très complet de tables-rondes autour de la logistique urbaine. Les 4 tables-rondes organisées, animées par Jérôme Libeskind et Bruno Durand, ont constitué des temps forts de cet événement.

La première table-ronde : livraison dans l’heure ou livraison à l’heure a été l’occasion de confronter les modèles de livraison instantanée. Pourquoi nous faisons-nous livrer immédiatement, quels sont les besoins ? Une question pertinente de la salle nous interpellait. Ne pouvons-nous pas nous faire livrer plus lentement afin de mieux consolider les livraisons et livrer plus propre ? Cette question pertinente reste toutefois décalée par rapport aux pratiques. Laetitia Dablanc (IFSTTAR) nous expliquait que les livraisons instantanées représentent déjà 3 à 5% des flux à Paris mais 10% à New York. Colisweb nous a exposé ses différents modèles déjà déployés dans 30 villes, en ship-from-store au départ des magasins ou des drives. Star’s Service nous a expliqué que ces livraisons rapides font partie du modèle de l’entreprise, qui souhaite toutefois le maintenir son schéma d’emploi de CDI, certes plus cher que le modèle d’autoentrepreneur, mais plus stable et gage de qualité. Arnaud Marlois (Fleeters) a développé une application qui s’adresse aux distributeurs, pas seulement dans les grandes métropoles. Stéphane Tuot (Franprix), a expliqué l’enjeu de la livraison instantanée pour un distributeur, afin de faire face aux grands e-marchands. Franprix a toujours été innovant en termes de services au consommateur et la livraison instantanée en fait partie.  Trouver un équilibre entre modèle social, environnemental et réponse au besoin d’instantanéité du consommateur est un vrai défi, au cœur des problématiques de la logistique urbaine.

La seconde table-ronde traitait des enjeux de la data dans le dernier kilomètre. Il y a fort longtemps que le transport ne se limite pas à des activités de mouvement physique des marchandises. La data est au cœur de toutes les préoccupations. Elle concerne par exemple le modèle des plateformes d’intermédiation, en plein développement. Elisabeth Charrier (FNTR) nous a expliqué la position de la profession visant à ne pas rejeter ces plateformes, qui constituent un progrès technologique, mais à garantir une confidentialité des données et à ne pas entrer dans un schéma de dépendance. Michel Leclerc, avocat spécialisé dans les plateformes et l’économie collaborative (Parallel avocats), nous a rappelé le cadre juridique de ces plateformes, qui pour beaucoup d’entre elles ne sont pas commissionnaires de transports et nous a expliqué l’état des débats européens sur ce sujet. Eric Petit (Ecologie Logistique), nous a expliqué son travail afin de géolocaliser les flux d’un messager et les enjeux de l’optimisation des flux pour un transporteur. Xavier Hua (Institut du Commerce) nous a brièvement rappelé les travaux qui ont été effectués sur l’ultramutualisation et leur possible application pour la logistique urbaine. Isabelle Bardin a insisté sur le manque de données fiables à l’échelle d’un territoire urbain, permettant de simuler de façon optimale les flux de marchandises. Isabelle Bardin a également évoqué le sujet des CDU, basé sur les échanges de données entre transporteurs afin de regrouper les livraisons. Le bilan des CDU en France reste mitigé. Enfin Stéphane Cren (GS1) nous a présenté les tous derniers travaux de GS1 sur la mutualisation des flux et les prises de rendez-vous.

  

Jeudi 22 mars, la 3ème table-ronde de ce programme était centrée sur les expériences suisses et allemandes en logistique urbaine. Le benchmark international est indispensable afin de partager la connaissance et progresser dans les solutions. Matthias Hormuth (PTV group) nous a expliqué l’implication du groupe PTV dans la mise en œuvre d’outils afin d’optimiser la logistique urbaine, notamment pour les livraisons en cargocycles. Ville Heimgartner (Imagine Cargo) nous a présenté le modèle de cette entreprise, déployée en Suisse, Allemagne et Autriche visant à livrer les villes en vélocargos et utiliser, pour les trajets importants, des conteneurs positionnés dans les trains régionaux. Harry Salamon (Mercedes Benz) nous a expliqué l’expérience réalisée à Zürich de collecte de produits en drones et atterrissage du drone sur un véhicule Mercedes afin d’effectuer le dernier kilomètre. Samuel Denaes (Kratzer automation) nous a expliqué l’intérêt du TMS développé afin d’optimiser les flux en ville.

La dernière table-ronde de ce cycle, dont le vaste sujet couvrait les drones, robots de livraison et cyclologistique, a probablement été celle qui a attiré le plus grand public. Jean-Luc Defrance (Geopost) nous a expliqué comme le drone peut être un moyen efficace de livraison dans des zones reculées. La technologie du drone évolue très vite et les obstacles naturels (vent, pluie, altitude, port de charge) deviennent de moins en moins contraignants. Par contre, la réglementation reste complexe, notamment en milieu urbain. Vincent Talon (TwinswHeel) nous a expliqué que le droide développé, déjà en service, peut permettre de réduire les coûts de la livraison, tout en restant 100% propre. Bruno Durand a souligné que les matériels présentés ont tous leur place en ville, avec toutefois des segments et des utilisations différentes. Xavie Laÿ (Bluedistrib) nous a exposé les multiples modèles de Bluedistrib, notamment l’utilisation des consignes afin de recharger des scooters électriques ou comme micro-espace logistique urbain. Francisco Luciano, longuement applaudi, nous a expliqué avec passion l’efficacité des modèles de cyclologistique afin de livrer les villes. Le vélo n’est pas du marketing en logistique, les avancées technologiques permettent de mettre en place des modèles logistiques pertinents avec des biporteurs, des vélos remorques, des cargocycles ou des quadricycles. Francisco Luciano nous a présenté un vélo (donc moins de 250 w) avec 6 roues, permettant d’augmenter la charge. La cyclologistique n’en est qu’à ses débuts et constituera sans aucun doute une solution pour les centres villes, à condition de disposer d’espaces logistiques de proximité permettant d’effectuer la rupture de charge.

  

Merci à tous les intervenants à ces tables-rondes, qui ont accepté de partager leur connaissance, leur expérience et échanger avec la salle sur les différents modèles.

Le concept de Centre de Distribution Urbaine consiste à consolider les flux en provenance de différents transporteurs, à destination d’un territoire urbain.

Ainsi, les transporteurs déposent sur un site positionné en périphérie de la zone urbaine dense les marchandises dédiées à ce secteur.

Un opérateur « neutre » vis-à-vis des transporteurs remettants constitue alors des tournées optimisées.

Ces tournées très denses, puisqu’elles agrègent les flux de plusieurs transporteurs, sont effectuées en véhicule propre.

Le CDU, modèle expérimenté à travers l’Europe depuis 20 ans, présente d’énormes avantages :

  • Moins de véhicules dans la ville
  • Distance réduite des tournées de livraison

Si ces tournées urbaines sont effectuées en véhicules propres, nous arrivons donc à un bilan environnemental très favorable.

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Pourtant, les nombreuses expériences dans plusieurs pays, et notamment en France, montrent que ce modèle ne fonctionne pas bien et ne recueille pas l’adhésion des acteurs concernés.

Pendant de nombreuses années, ce modèle de regroupement des tournées multi-transporteurs, donc l’équivalent des CDU, était celui de certains secteurs ou départements ruraux. Dans de nombreuses régions, un ou deux transporteurs régionaux récupéraient les flux de tous les grands messagers nationaux et effectuaient des tournées consolidées locales. Il y avait un intérêt économique majeur dans des régions dans lesquelles chaque transporteur n’avait pas individuellement les flux suffisants pour justifier une agence.

Les grandes agglomérations ne répondent pas à cette problématique. En effet, les groupes de transport, que ce soit en messagerie traditionnelle ou livraison de colis, ont dans les grandes agglomérations des flux justifiant des installations en propre. Pourquoi alors confier ces flux à un transporteur tiers ?

Le modèle du CDU se rapproche d’ailleurs de l’origine des gares routières, notamment de Sogaris, qui, dans les années 1960, consolidait les flux pour Paris intra-muros et effectuait la livraison finale pour le compte de transporteurs. Cette expérience s’est avérée désastreuse, les transporteurs remettants confiant à l’opérateur tiers les positions les plus compliquées (livraison en étage, longueurs, etc.).

Nous constatons d’ailleurs que les CDU qui ont une chance de fonctionner sont ceux qui ont choisi comme opérateur un groupe qui maîtrise une partie significative des flux de l’agglomération (La Poste par exemple).

Les autres opérateurs accepteront-ils de confier leurs flux urbains à un concurrent ? Ceci est loin d’être évident. Le premier exemple de ce type, dont nous observerons avec attention les résultats, est celui de Grenoble.

Le second sujet qui fait que de nombreux CDU ont fermé ou sont en situation d’échec est le principe même de la rupture de charge.

Arrêter les flux à l’entrée de la zone urbaine, reconfigurer des tournées et livrer implique nécessairement un surcoût. Les métiers de la distribution du dernier kilomètre sont des métiers à marge très faible. Ajouter un surcoût à la livraison urbaine ne peut se concevoir que si une réglementation locale impose de passer par ce schéma. C’est par exemple le cas de Monaco.

Cela signifie également que recevoir un colis en centre urbain coute plus cher que dans d’autres secteurs et que le consommateur, particulier ou entreprise, acceptera de payer ce surcoût, comme dans les stations de montagne ou îles, secteurs auxquels sont souvent affectés des suppléments tarifaires.

La distribution des marchandises en milieu urbain devient alors un service public de livraison de marchandises, éventuellement confié à un opérateur sous la forme d’une Délégation de Service Public (DSP).

Très peu de villes en Europe sont disposées franchir cette étape, qui certes apporte un avantage environnemental, mais crée des contraintes et des oppositions locales fortes. Elles ne peuvent être justifiées que par des raisons exceptionnelles, de centre historique particulièrement dense ou de situation géographique spécifique.

Autre point, les contraintes de livraison et d’information. Consolider les flux de plusieurs transporteurs nécessite de lourds développements informatiques, à l’heure où la différence concurrentielle entre les offres dépend de l’information. Chaque transporteur rivalise d’imagination et de technologie sur les horaires de livraison, les créneaux de rendez-vous, la possibilité de modifier au dernier moment le lieu, la date, l’horaire. Les transporteurs proposent de multiples services, notamment à partir d’applications smartphone. Consolider les flux de différents transporteurs nécessitera de plus en plus une grande agilité informatique.

L’avenir du modèle CDU français, expérimenté dans plusieurs villes, de Lille à Annecy, mais aussi La Rochelle, Saint-Etienne ou Bayonne, tient beaucoup à la recherche d’un équilibre économique.

Ce n’est certainement pas le rôle des collectivités publiques de remplacer le rôle d’entrepreneur de l’opérateur, qui doit apporter un service, rechercher ses clients et maîtriser sa politique économique. N’oublions pas que le CDU n’est qu’un des modèles de la logistique urbaine, et peut-être un des plus compliqué à mettre en œuvre.