Archive d’étiquettes pour : logistique urbaine

A l’heure de l’économie collaborative, le partage est le mot central. Nous partageons les voitures, les appartements, les vélos…

Dans les villes, la mobilité des personnes et notamment les réseaux de transport en commun constituent des axes structurants. Lignes de bus, de plus en plus en site propre, tramway, métro, autocars, RER…

D’où l’idée de partager ces moyens de transport de personnes … pour les marchandises.

Evidemment, nous nous heurtons à de nombreux obstacles, le premier d’entre eux étant la saturation de certaines lignes à certains horaires, notamment en région parisienne.

Mais le partage pourrait avoir différentes formes.

La première forme serait d’imaginer dans certains transports une petite partie réservée à des colis. Cela peut paraître absurde mais l’expérience a déjà existé. En effet, en 1877, la Compagnie Générale des Omnibus, avait installé dans toutes ses voitures parisiennes une boîte destinée à recevoir des colis de petite dimension. Ces boîtes étaient situées à l’extrémité du marchepied, offraient une contenance d’un dixième de m3. La Compagnie Générale des Omnibus acceptait des colis d’une dimension maximale de 0,60 x 0,35 x 0,35 et un poids de 20 kg. Sur les 702 voitures et une amplitude horaire de 7h à minuit, cela représentait l’équivalent de 10 000 courses par jour et une capacité de 1000 m3.

omnibusCette expérience, certes à une époque différente, montre cependant que le partage des infrastructures voyageurs / marchandises n’est pas totalement utopique.

Dans certains pays comme la Suisse ou l’Autriche, le partage des autocars, d’ailleurs souvent postaux, est très répandu.

Une seconde forme de partage, utilisée assez couramment par La Poste, est l’utilisation, dans certains tramways ou bus, à certaines périodes de la journée, de l’espace pour les chariots de distribution du courrier.

Là encore, l’optimisation des ressources existantes permet de réduire le nombre de véhicules circulant en ville.

L’utilisation des voies de métro, RER ou maintenant de tramway, pour le transport de marchandises, même si l’idée est assez ancienne, n’est aujourd’hui plus un tabou.  De nombreux projets existent dans ce domaine.

Ces quelques idées montrent que le partage des infrastructures de transport public de personnes, malgré leur saturation à certaines heures, est une idée sans aucun doute cohérente afin de participer au transfert modal et donc à la réduction des nuisances en villes générées par le transport de marchandises.

2014-02-26 17.17.11Une exposition retrace en ce moment à Paris (musée de la Marine) une opération de logistique urbaine qui mérite sans aucun doute le détour, celle de l’obélisque de la Concorde. Un petit retour en arrière permet de comprendre l’organisation de cette opération hors du commun.

En 1829, Mehemmet-Ali, vice-roi d’Egypte, fait cadeau à France d’un obélisque. Champollion (déjà lui…), les examine tous et ne choisit pas le plus simple à transférer, en l’occurrence un de ceux positionnés à Louxor.

Cet obélisque fait pas moins de 230 tonnes et 22,37 mètres de haut. Evidemment,  c’est un projet « pharaonique »…

Un homme sera au cœur de cette opération, un vrai Supply Chain Manager, Apollinaire Lebas.

Apollinaire Lebas

Apollinaire Lebas

Retraçons le cheminement et rendons lui hommage.

Le 19 décembre 1831, l’obélisque est chargé et amarré sur un bateau construit pour l’occasion et nommé « Le Louxor ». Il arrive en janvier 1833, à Alexandrie (environ 750 kilomètres) après maintes difficultés. Le 1er avril 1833, l’obélisque quitte Alexandrie, toujours sur le « Louxor » mais remorqué par un bateau à vapeur le Sphinx. Il arrive à Toulon le 10 mai, puis s’arrête à Gibraltar, Algeciras, La Corogne, Cherbourg, Le Havre et enfin Rouen, le 14 septembre 1833.bloc_conf2_louxor

Le bateau attend la crue de la Seine durant 3 mois et quitte Rouen le 19 décembre 1833 pour arriver 10 jours après à Paris.

Donc un parcours de 2 ans mais avec une arrivée à bon port !

Le débat pour l’emplacement choisi par Louis-Philippe durera un certain temps puisque l’obélisque attendra encore près de 3 ans (le 25 octobre 1836) pour être positionné place de la Concorde devant une foule de 200 000 personnes.

Notre Supply Chain Manager tout désigné nous a donc appris que l’important, ce n’est pas nécessairement le délai, mais le respect d’un engagement.

Nous apprenons également que Louis-Philippe souhaitait, en choisissant ce lieu pour l’obélisque, que cette place ne porte plus la marque de l’échafaud. Elle a donc peut-être maintenant, avec l’obélisque et l’espace logistique urbain de Chronopost situé en dessous, la marque de la logistique urbaine!

Economie de partage, crowdsharing, les noms de manquent pas pour désigner ces nouveaux modes de consommation, plus solidaires et permettant de mieux partager des moyens, voitures, vélos, appartementsLa logistique urbaine, comme d’autres secteurs de l’économie, n’échappe pas à cette évolution sociétale.

Plusieurs aspects me semblent intéressants à exposer.

Tout d’abord, la logistique urbaine nécessite de mieux partager la voirie. Pendant des décennies, la voirie était réservée prioritairement aux voitures, mais aussi aux véhicules de livraison, se garant parfois en double file pour de multiples raisons, et accessoirement aux transports en commun et piétons. Sont arrivés dans les villes les tramways, les vélos, les 2 roues motorisés et surtout une volonté de mieux respecter le piéton, souvent habitant d’un centre ville que l’on souhaite rendre plus attractif.

Un des aspects d’une meilleure logistique urbaine passe par ce partage de la voirie. Mais pas dans n’importe quelles conditions. Ce partage doit être vertueux, c’est-à-dire permettre aux piétons de disposer d’un peu plu d’espace public pendant les horaires d’activité intense (par exemple en fin d’après-midi et le samedi), aux véhicules de livraison de pouvoir effectuer leur mission avec le maximum d’efficacité et le moins de perturbations possibles (pendant les horaires de livraison matinale par exemple), permettre aux autres véhicules de circuler normalement ou de stationner. Cela passe bien sûr par la réglementation, mais surtout la concertation. Un bon exemple de ce partage de voirie a été mis en place à Bruxelles, sur l’avenue Louise. Cette initiative réussie a été présentée lors du workshop Bestfact des 29 et 30 janvier.

Bruxelles, avenue Louise

Bruxelles, avenue Louise

La ville de Paris a également adopté avec succès cette idée du partage pour les places de livraison en répartissant les 10 000 places de la ville de places « sanctuarisées » et « places partagées ». Ces dernières permettent aux automobilistes de stationner la nuit et les dimanches et aux activités de livraison d’utiliser ces places en journée.

places de livraison partagées à Paris

places de livraison partagées à Paris

Un second aspect du partage est dans l’immédiat théorique, mais est promis  certainement à  un grand avenir.

La logistique urbaine nécessite des surfaces afin de consolider des flux ou changer de mode de transport. Les surfaces immobilières en ville représentent un coût très élevé qui pénalise la mise en œuvre de solutions. Ces locaux ne sont utilisés que quelques heures dans la journée, souvent le matin tôt (jusqu’à 9h environ) et le soir. Imaginons alors des solutions de partage, permettant à ces mêmes locaux d’accueillir dans la journée d’autres activités et de partager ainsi les coûts. Pourquoi par exemple ne pas imaginer des surfaces qui permettraient le matin de trier des colis, puis à 10 h, d’accueillir des activités d’association (sport par exemple) et qui retrouveraient à 16h ou 17h une activité logistique ?

Enfin une autre idée du partage est la livraison. Certaines expériences de crowdsharing ont été initiées, en permettant à des particuliers de livrer des colis ou des courses alimentaires pour le compte d’autres particuliers. Voir article de ce  blog sur l’expérience Myways de Stockholm. Walmart s’intéresse également de très près à cette idée aux Etats-Unis.

Alors imaginons la logistique urbaine en partageant!