imagesCAK8DTCLLe projet de loi de la transition énergétique pour une croissance verte est présenté ce matin en conseil des ministres.

Avant de parler du fond, parlons de la forme. Le terme « transition », qui signifie littéralement « action de passer, passage », mais aussi « défection (passage à l’ennemi) » et « contagion » n’est probablement pas le terme le plus adapté pour ce grand projet.

Il aurait mieux valu utiliser le terme « mutation » qui donne un côté plus pérenne à cette loi. En effet, lorsque l’on parle de politique énergétique, puisque c’est là le sujet, il est préférable de s’inscrire dans la durée. Les choix effectués en terme d’énergie sont des choix à long terme, s’inscrivant dans une politique d’investissements.

« Mutation » signifie littéralement « changement, transformation ». C’est donc sans aucun doute un terme beaucoup plus pertinent que « transition », qui est plus adapté à un ministre qu’à une politique énergétique !

Sur le fond, plusieurs changements essentiels concernant les transports et la logistique :

Tout d’abord le facteur 4 : diviser par 4 les émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2050. Evidemment, 2050, c’est loin, même très loin. Est-il raisonnable de voir à très très long terme ? Mais bon… Cela signifie en tout cas clairement la fin du diesel. Même si les motorisations continuent à s’améliorer, diviser par 4 semble un peu optimiste, en sachant que nous visons un retour à une croissance économique.

Un second sujet essentiel est de favoriser les transports propres. Le texte de base qui favorisait les véhicules électriques et hybrides a désormais un peu étendu son champ et encourage «tous les véhicules ayant un très faible niveau d’émission de gaz à effet de serre et polluants atmosphériques». Ainsi, tous les véhicules peu polluants, type biogaz, seront concernés par la nouvelle loi sur la transition énergétique.

C’est une bonne nouvelle. Le tout électrique n’est probablement pas adapté à tous les cas de figure, notamment dans le transport. Il a le biogaz, le GNV, et d’ici 2050, nous aurons probablement trouvé d’autres idées pertinentes.

Mais si le choix énergétique est essentiel dans les transports, il est loin d’être suffisant. Il existe plusieurs axes au moins aussi importants : le transfert modal (donc moins de camions sur les routes), l’optimisation des moyens par la consolidation des flux (ce n’est pas très médiatique mais très efficace) et surtout notre mode de vie.

Le mode de vie actuel est basé sur l’augmentation continuelle des flux de transport : délocalisation, fruits et légumes hors saison, e-commerce, livraisons à domicile, …

Ce n’est pas une loi qui changera notre mode de vie. C’est plutôt une prise de conscience vers l’achat de proximité, la labellisation énergétique des produits, le made in « notre quartier, notre région ».

L’énergie n’est qu’un des maillons d’une chaîne. Elle est d’ailleurs souvent le dernier maillon d’une chaîne de consommation et de production.

Ce vaste sujet, qui semble être, et c’est une bonne nouvelle, doté d’ambitions majeures, aurait mérité un débat plus large, comme cela a été le cas du Grenelle, dont nous pouvons regretter le peu de réalisations concrètes.

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Non, tous les consommateurs n’utilisent pas les magasins uniquement comme showrooms, afin de regarder des produits, les essayer et les acheter ensuite moins cher sur internet. Nous le faisons tous probablement parfois, mais fort heureusement pour la survie de nos commerces, cela ne constitue pas la majorité des cas.
Les récentes études nous apprennent même que nous « webroomons » plus que nous « showroomons ». Donc avant de nous déplacer dans un magasin pour acheter un aspirateur ou une raquette de tennis, nous regardons ce qui existe sur internet et à quel prix. Puis nous allons acheter ce produit dans un magasin. Internet nous permet de faire notre benchmark, mais la visualisation en magasin, l’essai, le toucher d’un article ou d’un tissu, est irremplaçable.
Ouf ! Nos magasins continueront donc encore un moment à exister ! Nos centres commerciaux ne suivront pas immédiatement le chemin des shopping malls américains, qui souffrent de leur modèle en concurrence directe avec le web.
Tant mieux aussi pour l’environnement de nos agglomérations. En effet, l’achat sur internet génère des colis alors que l’achat en magasin nécessite des palettes, avec un impact environnemental différent tant du fait du conditionnement que du transport.
Les deux circuits nécessitent des organisations logistiques totalement différentes et souvent opposées.
L’approvisionnement en B to C va nécessiter des préparations de commandes unitaires dans un entrepôt, donc beaucoup de surface au sol, une mécanisation importante, une chaîne de conditionnement, du personnel en grand nombre et une utilisation massive de cartons ou d’enveloppes plastifiées. En livraison, ce mode de consommation va générer soit l’envoi de colis directement vers le consommateur, soit la livraison de points relais, consignes ou points de click & collect.
A contrario, l’approvisionnement des magasins peut nécessiter du picking colis mais génère en finalité des palettes. Il s’agit là d’entrepôts « classiques » équipés de palettiers, avec des niveaux de picking dans les espaces inférieurs et des palettes complètes en réserve sur les niveaux supérieurs. Le transport est ensuite effectué soit en messagerie, soit en réseaux de distribution de lots, suivant les volumes.
Par conséquent, pour le même produit, showrooming ou webrooming implique une organisation logistique totalement différente et un impact environnemental inégal.
Au-delà des aspects environnementaux des deux solutions, le coût logistique et transport n’est pas identique. Cette différence est souvent opaque pour le consommateur, qui est attiré par la livraison gratuite promise sur de nombreux sites web. Mais bien évidemment, la production logistique et le transport lié au showrooming reviennent beaucoup plus cher que le webrooming…
Ce que nous oublions parfois, c’est que lorsque nous allons acheter notre aspirateur dans un magasin, nous faisons nous-même le dernier kilomètre ! Le showrooming nous a appris à voir, regarder, essayer dans un magasin, puis demander à un prestataire de faire le dernier kilomètre à notre place …
Si webrooming et shorooming font bon ménage et cohabitent dans un environnement de consommation crosscanal dans lequel les frontières sont de plus en plus floues, le fonctionnement économique des deux solutions n’est pas identique. Le magasin supporte le coût immobilier et d’exploitation, la sécurité, la démarque, la présentation des produits. Le site web va supporter tout ou partie du coût logistique et transport.
Si ce coût logistique commence progressivement à être répercuté, il n’est est pas de même pour le coût du magasin.
Dans le passé, lorsqu’on accompagnait un voyageur sur le quai d’une gare, on payait un ticket de quai. Ne devrions-nous pas alors inventer le ticket de showrooming ?

 

Certains considèrent que parler de logistique urbaine est une mode. D’autre pensent que les problématiques sont réelles mais que jamais nous ne trouverons de solution pour désengorger les villes, réduire les externalités négatives, la pollution. Ce sont des pessimistes.

Depuis quelques temps, rares sont les supports soit professionnels, soit économiques qui, à un moment ou un autre, ne parlent pas de ce sujet, qui a pourtant été oublié pendant de très nombreuses années.

Les manifestations, colloques, conférences et autres débats sur le sujet se multiplient au point, à certains moments, de devoir choisir entre le fluvial et le ferroviaire…

Les supports de presse, les associations professionnelles, les clusters, les universités relaient, souvent avec beaucoup de talent, ces sujets. Les thèses, mémoires, études et autres livres blancs sur le sujet se multiplient.

Le dernier numéro du Journal de la Logistique vient d’ailleurs de publier un article sur la logistique urbaine et la grande distribution (article rédigé par Jérôme Libeskind et Juliette Collin)

jdl116Ce foisonnement d’idées, d’écrits, d’échanges est une chance à saisir. Jamais en effet ce sujet n’a autant focalisé les esprits.

Fort heureusement, la logistique urbaine n’est pas l’apanage des chercheurs, universitaires et journalistes, même si leur rôle d’initiative, de témoignage et de développement d’idées reste essentiel afin d’orienter les esprits et le débat d’idées.

Les professionnels du transport et de la logistique, de la grande distribution, innovent régulièrement dans ce domaine. Des startups se créent régulièrement autour de ces sujets et il faut en saluer le courage, dans la période de crise économique que nous connaissons.

On découvre que les modèles en place ou les analyses effectuées lors de la dernière décennie sont profondément modifiés par l’évolution de la consommation, tant du fait de l’e-commerce, de la livraison à domicile que des prémices de la consommation collaborative.

Dans ce schéma, ce n’est plus le magasin qui décide, mais le consommateur ! De ce fait, plus rien ne fonctionne comme avant. L’e-commerce a transformé le consommateur que nous sommes en acteur. Il ne vient plus « passivement » dans un magasin acheter et emporter son produit. Il choisit ce qu’il veut acheter, parmi un nombre beaucoup plus important de commerçants, avec des comparateurs de prix et surtout des solutions diverses de livraison, à des prix également différents. Il peut, plus qu’avant, acheter à des particuliers (le C to C).

S’il n’est pas satisfait, il renvoie le produit, le plus normalement du monde, et attend son remboursement.

Mais les problèmes les plus basiques sont toujours présents : le camion qui livre ne sais pas où stationner, il livre souvent un destinataire absent, il met toujours autant de temps, voire plus, pour effectuer ses livraisons, il pollue souvent toujours autant, il se plaint d’une réglementation contraignante et mal appliquée, souvent méconnue.

La logistique urbaine, dont l’objectif est d’améliorer cette chaîne complexe de distribution des marchandises dans les villes, est en fait un ensemble de solutions qui fait partie du périmètre de la mobilité dans les villes et de leur attractivité.

Elle touche aux transports et à la logistique, à l’urbanisme, à l’écologie et à la consommation. Chaque ville étant différente, il n’y a pas de solution unique mais des solutions adaptées aux problématiques de chaque agglomération.

La suroffre de messages autour de ce sujet est une chance à saisir ! Elle a pour but de sensibiliser les différents acteurs de la chaîne et en premier lieu les acteurs politiques, sans qui rien ou presque ne peut être imaginé et mis en œuvre.