Le transport fluvial de marchandises dans Paris intramuros : une logistique urbaine durable avec une histoire.

La Seine à Bercy - Quai du Louvre -

Nous voyons avec beaucoup de satisfaction apparaître de très belles réalisations de logistique urbaine utilisant la voie d’eau, qui traverse Paris et permet d’accéder aux quartiers centraux sans utiliser les voies routières encombrées.

Depuis septembre 2012, Franprix charge quotidiennement des conteneurs sur une barge au port de Bonneuil-sur-Marne et les achemine au port de la Bourdonnais (7ème arrondissement, au pied de la tour Eiffel !). Ces conteneurs sont rechargés sur des remorques et acheminés vers les magasins. Ceci concerne 48 conteneurs par jour, donc autant de camions qui n’entrent pas dans Paris.

Autre expérience, celle de Vert Chez Vous, qui a mis en place une navette fluviale au départ du Port de Tolbiac, avec 5 arrêts au cœur de Paris.

Nous avons tous en mémoire les panneaux publicitaires montrant la Seine magnifiquement dégagée alors même que les voies routières urbaines sont encombrées.

Mais l’utilisation de la Seine pour acheminer les marchandises dans Paris n’est pas nouvelle. Elle a même une très longue histoire. Sous l’Ancien Régime, les études ont montré que 37% des denrées alimentaires (1780) à destination de Paris étaient acheminées par la Seine. Les bassins de la Loire et de la Seine communiquaient en utilisant les canaux d’Orléans, de Loing et de Briare.

Les écrits de l’époque font d’ailleurs état de problématiques d’encombrement des ports parisiens et de la nécessité de mettre en place une réglementation permettant d’améliorer la fluidité du trafic. Au milieu du 18ème siècle, 12 ports et quais sont répertoriés à l’intérieur de Paris, essentiellement rive droite, avec pour chaque emplacement une spécialisation en denrées.

La navigation fluviale, malgré ses nombreux aléas, jouait ainsi un rôle essentiel dans le dispositif d’approvisionnement de la capitale.

Ces rappels historiques peuvent nous aider à comprendre le potentiel dont Paris dispose pour assurer une distribution des marchandises plus respectueuse de l’environnement.

Nous ne pouvons que nous réjouir des différentes expériences allant dans ce sens.

Certes, le modèle économique n’est pas unique, mais les autorités, par la maîtrise des voies fluviales, des canaux et des ports, ont tous les outils pour convaincre les distributeurs et opérateurs de l’enjeu du transfert modal sur le réseau fluvial.

Un entrepôt tri-modal de 63 000 m² sur un terrain de 33 hectares au cœur de Paris ?

l'inventeur du projet d'entrepôt tri-modal des Halles

l’inventeur du projet d’entrepôt tri-modal des Halles

 

Nous ne sommes pas un premier avril… Mais cet entrepôt aurait pourtant bien pu exister.

Nous sommes en 1845. Une consultation est lancée pour la construction des Halles de Paris.

Plusieurs architectes y répondent et le projet de l’architecte Hector Horeau est écarté.

Bien sûr, il est utopique, quoi que…

Le bâtiment imaginé par Horeau était de 63 000 m² (150 m x 420 m) et situé au droit du quai de la Megisserie.

projet Halles Horeau

 

 

3 chemins de fer à double voie devaient relier les caves de cette halle, un au centre et un à chaque extrémité Est et Ouest. Ces 6 voies de chemin de fer, très proches de la Seine  et désservies par 2 doubles rampes aux extrémités Sud et Nord, étaient prévues pour faciliter l’approvisionnement et également pour l’évacuation des déchets des Halles. Hector Horeau avait prévu que les déchets des Halles soient poussés du rez-de-chaussée directement dans les waggons circulant sur le chemin de fer souterrain. La proximité de la Seine permettait d’utiliser le mode fluvial, en complément du réseau ferroviaire pour l’approvisionnement et également l’enlèvement des déchets.

L’utilisation de ces deux modes alternatifs avait pour objectif, dans le projet de Horeau, de réduire l’encombrement des Halles….

Ce projet visionnaire, oublié au profit de la réalisation, non moins novatrice, notamment sur le plan architectural, de Victor Baltard, était d’une conception tout à fait intéressante. Ainsi, dès le mileu du XIXe siècle, les plate-formes trimodales étaient déjà au cœur des préoccupations de certains architectes.

La logistique urbaine serait-elle donc une idée du 19ème siècle ?

Hôtels logistiques : l’exemple viendrait-il de Hong Kong ?

A l’heure où nous voyons apparaître à Paris des projets d’hôtels logistiques afin d’accueillir en ville des activités de livraison du dernier kilomètre (centres de distribution urbaine) mais aussi des activités e-commerce, il me semble que les réalisations sur d’autres continents doivent être observées et analysées.
L’exemple récent le plus frappant est celui de l’immeuble Interlink, réalisé par Goodman à Hong Kong. Bien sûr, Hong Kong n’est pas Paris et a d’autres particularités, mais l’observation de cette réalisation peut aider à la réflexion.
Cet immeuble de 24 étages développe une surface de 222 000 m² totalement dédiée aux activités logistiques. Rien ne semble avoir été oublié : rampes pour véhicules poids lourds, monte-charges, ascenseurs. La commercialisation de cet immeuble livré en 2012 s’est effectuée très rapidement auprès de sociétés internationales et locales. Il est vrai que cet immeuble bénéficie d’une localisation privilégiée, proche du port.
Cet immeuble constitue le 4ème entrepôt le plus grand de Hong Kong et le plus important réalisé lors des 10 dernières années.
Cette réalisation n’est bien sûr pas adaptée à Paris ni même probablement à aucune ville européenne, mais la construction de sites logistiques en étages (2,3 ou 4 étages) est peut-être une bonne solution pour de nombreuses activités : logistique du dernier kilomètre, logistique e-commerce pour des pure players (habillement, électronique grand public, etc…) qui n’ont généralement pas nécessité d’entrepôts en grande hauteur du fait du nombre de références à gérer (souvent plus de 100 000).
L’exemple d’Interlink nous montre que la mixité des activités, tertiaires, logistiques, commerciales, qui est parfois intégrée dans les projets d’hôtels logistiques n’est pas une nécessité. Il est certainement plus facile de faire cohabiter dans le même immeuble des activités d’une typologie très proche (transport et logistique) que de tenter la mixité d’activités avec chacune des contraintes d’exploitation ou administratives différentes. Mais il n’y pas probablement pas une réponse unique à la rareté du foncier et à la nécessité de préserver des espaces en ville pour les activités logistiques.
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